Confiance et bonne humeur en formation

Citation (Faux texte)

En formation, ça ne se décrète pas, mais d'une certaine façon cela s'impose…

Confiance et bonne humeur sont des ressources importantes à mes yeux, en ceci qu’elles sont connectées à des valeurs auxquelles je suis tout particulièrement attaché. Ainsi, mon instinct m’a toujours poussé à créer, puis entretenir un climat de confiance et de bonne humeur lors de la totalité de mes interventions en formation.

La confiance – pas plus que la bonne humeur – n’est une chose qui se décrète. Et c’est bien là le problème. Alors au début de chacune de mes interventions, dès les premières minutes (qui sont, à mes yeux, absolument déterminantes), j'annonce un certain nombre de choses à mes apprenants, parmi lesquelles ceci :

La confiance en premier

Si nous voulons avoir des chances de terminer cette session avec le sentiment d’avoir appris quelque-chose d’utile pour nous, si chacun d’entre nous veut avoir le sentiment de repartir d’ici en emportant avec lui "quelque-chose de plus", il y a deux ingrédients à mes yeux indispensables. Pas suffisants, mais indispensables.

Le premier de ces ingrédients est la confiance. En effet, pour pouvoir faire mon travail j’ai besoin de votre confiance. J’ai besoin que vous ayez un minimum de confiance en moi, et aussi en vous (confiance en soi, confiance en l’autre… au fond, les deux ne sont-elles pas liées ?), ne serait-ce qu’un tout petit peu. Je ne puis l’exiger, ni même attendre de vous que vous vous engagiez en ce sens, et pourtant je vous l’affirme : rien, absolument rien ne sera possible sans un minimum de confiance. Nous sommes là pour la construire ensemble (entre autres), et pour cela j’ai besoin de vous, de votre bienveillance (c’est-à-dire votre capacité à veiller en imaginant qu’il peut advenir quelque chose de bien). Attention, il ne s’agit en aucun cas d’une confiance aveugle. Surtout, ne prenez jamais pour argent comptant ce que je vous dis ici, gardez précieusement votre capacité d’analyse ! Mais attention, si je vous demande de ne rien croire a priori, je vous demande juste… d’essayer. D'essayer quoi ? ...eh bien, simplement d'appliquer par la suite les différents points abordés ici. Toute la différence est là. Car celui qui choisit l’attitude inverse (veiller en imaginant qu’il ne peut que survenir quelque chose de mal [1], est beaucoup plus sûr de gagner. En fait, disons-le tout net, il a même l’assurance de gagner à tous les coups, avec en prime la satisfaction amère du "…je l’avais bien dit ! ".

La bonne humeur, maintenant... TOUTES vos questions m'intéressent

Le deuxième de ces ingrédients est la bonne humeur. Et même, osons le dire, l’humour. En tout cas une ambiance décomplexée. A cet égard, toutes vos questions m’intéressent. Je vous promets que je ne me dirai jamais "Ah bon, c’est ça, sa question ? " […ici imaginer une mimique déçue], car mon boulot c’est de me souvenir que cinq minutes avant de savoir telle ou telle chose, eh bien je ne la savais pas encore!… mon boulot, c’est aussi de ne pas faire une tête d’enterrement en réponse à votre question sous prétexte "qu’on vous l’a déjà dit", ou même "qu’on vient de le dire"… sil faut répéter certaines choses deux, trois, ou même dix fois, eh bien allons-y gaiement pour deux, trois ou même dix. Et j’ai bien dit "gaiement", parce que, pour le même prix, autant faire les choses dans la gaieté plutôt que dans la tristesse…

"Voilà, j’ai une question à poser, mais je ne sais pas si elle est bonne"...

Je tiens ici le pari que, même en ayant pris cette précaution, le premier d’entre vous qui aura une question à poser nous dira (ou au mieux, le pensera très fort) "Voilà, j’ai une question à poser, mais je ne sais pas si elle est bonne". Quel scandale ! Comme s’il pouvait y avoir des questions que, du haut de mon noble magistère, je trouve recevables, alors que d’autres pas! Eh bien justement nous sommes ici pour tordre le cou à l’idée qu’il existe des bonnes et des mauvaises questions. D'ailleurs je ne vous demanderai jamais si "…vous avez bien compris", je ne vous demanderai pas non plus si "ça va?"… A la place, je mettrai un point d’honneur à bien vous demander si j’ai été clair, toute la différence est là : je me tiens en effet pour entièrement responsable de ma communication, c’est-à-dire, dans notre relation, de la partie où je suis "émetteur" et où vous êtes "récepteur", si tant est que les choses soient toujours aussi simples. 

 

Les cauchemars d'apprentissage

ours en peluche sur le rebord d'une fenêtreLa situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui vous et moi (salle de cours, manuels, tableau [le plus souvent tableau de papier et/ou tableau blanc])… tout cela vous reconnecte peu ou prou avec des situations antérieures, venues de l’enfance, voire de la petite enfance… et ces situations font forcément remonter ce que j’appelle des cauchemars d'apprentissage, des situations où des gens ont provoqué de gros dégâts dans votre tête et votre affect. Dites-moi : est-ce que si j’emploie cette expression de "cauchemars d’apprentissage", comme ça, cela ne vous rappelle rien, ou au contraire cela vous évoque-t-il quelque-chose de précis ? […]".

Je fais "mouche" à tous les coups…

A ce moment-là de ma présentation, je peux dire que je fais "mouche" à tous les coups. Non seulement tout le monde, je dis bien tout le monde me regarde d’un air entendu, mais, et c’est là l’essentiel pour moi, les apprenants – sans aucune exception – me regardent en souriant.

Et c’est à partir de ce sourire, sourire qui lui non plus (tiens ?) ne se décrète pas, à partir de ce sourire conquis au prix d’un effort mental sans cesse renouvelé, ce sourire qui à mes yeux change tout, et qui à coup sûr sera suivi de beaucoup d’autres, mais aussi de bons moments, d’échanges, de rires, et même d’éclats de rire... que je peux prétendre "commencer à faire quelque-chose de propre" de ma mission, et même, disons-le, de ma vie d’homme.

Sans armes, ni artifices, ni estrade, ni barrière

Je tiens à me présenter devant mes apprenants sans armes, sans artifices, sans estrade (!), sans rajouter la moindre barrière (...comme si elles n’étaient pas déjà assez nombreuses !).

Rappelons au passage que mon "titre" est en quelque sorte remis en jeu à chaque fois, puisque longtemps il a suffi que les documents de fin de session – évaluations des apprenants, si on veut – fassent apparaître le moindre signe de mécontentement plus ou moins généralisé pour risquer me mettre définitivement hors-jeu par rapport à mon commanditaire [2].

Croyez-le bien, je n’agis pas ainsi avec mes participants par démagogie, mais bien parce que je suis persuadé qu’au vu des ressources dont je dispose c’est là ma seule chance d’arriver à faire mon travail malgré les conditions ubuesques dans lesquelles je me retrouve parfois (hétérogénéité des groupes, absence quasi-totale d’informations fiables arrivant jusqu’aux apprenants avant le début de la session, inadaptation de la durée de la session eu égard aux contenus prévus, conditions matérielles parfois calamiteuses…). Curieusement, à chaque fin de session, ma plus grande gratification vient de tous les "ah bon ? C’est l’heure ? Déjà ?" …que j’entends prononcer par mes apprenants. Immédiatement après arrive en général ce qui fait mon miel, à savoir "…Qu’est-ce qu’on a appris, et pourtant qu’est-ce qu’on a pu rire !". La belle affaire ! Comme si c’était antinomique !

Mais au fait : qui a dit que cela l’était… ?

 

Mise à jour du 12/05/2021

A propos de l'idée "Dans mon cours, il n'existe pas de mauvaise question" (voir plus haut...)

Dans "Nudge et autres coups de pouce pour mieux apprendre" (Pearson, 2021), Étienne Bressoud trouve qu'il existe tout de même une question idiote, en pareil cas. Voici son explication : "Lorsque j'enseignais à l'université, j'aimais commencer l'ensemble de mes interventions en expliquant à mes étudiants qu'il n'y avait pas de question idiote, sauf une : Celle qu'ils se poseraient le jour de l'examen final devant l'énoncé et qu'il n'auraient pas osé poser en cours par crainte du regard des autres".

 


[Notes]

 

[1] Le plus souvent, il s’agit (de la part de l'apprenant) de croyances limitantes sur sa propre personne… mon pire ennemi dans le travail !

[2] Et, même en pareil cas, le commanditaire ne fera pas de détail, quelles qu’en soient les raisons évoquées par les apprenants : attentes déçues, désillusions, sentiment qu’ils vont « se faire piéger » dès leur retour sur le poste de travail, mais aussi mauvais réglage de la climatisation ou mauvais choix du restaurant pour le repas pris en commun le midi… C’est ainsi ! Aussi incroyable que cela paraisse, le monde des formateurs freelance est « un autre monde » ! Il suffit pour s’en convaincre d’interroger n’importe quelle personne ayant exercé cette périlleuse (mais aussi – ô combien – édifiante) activité. En toutes circonstances on se doit de « faire en sorte que les gens soient contents », point final. Le pire, c’est qu’avec de la bouteille, on y arrive !



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Le Petit Abécédaire...

Livre 'Petit abécédaire...' - Bernard Lamailloux

"Un ouvrage bien documenté, écrit par quelqu'un qui sait de quoi il parle et qui le fait avec clarté humour et éthique. Les exemples et les conseils sont judicieux et très utiles. Je le recommanderai avec plaisir.."

Josiane de Saint Paul

Quel livre ! Un travail de moine. D'une grande originalité. J'ai à peine commencé à le parcourir et, déjà, je le savoure. Je vais d'ailleurs continuer à le déguster lentement. Bravo !

Serge Marquis


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