Une autre vision du mensonge (grâce à la CNV)

Main devant la bouche, comme pour ravaler nos paroles...

 

Quand nous étions petits, on nous a asséné certaines choses comme étant vérités ou mensonges. Or, ce que nous appelons communément "mensonge" n'est qu'une étiquette morale que nous plaquons sur les paroles d'un autre à chaque fois que ce qu'il dit ne me semble pas correspondre à ce qui est, ou tout au moins à la perception que nous en avons. Voici sous ces lignes une vision du mensonge plutôt différente :

Pourquoi mentons-nous ? quelques pistes peu courantes :

Ce peut être pour prendre soin de nous (quand nous envisageons - ou imaginons - les conséquences que notre parole peut avoir sur nous ou sur notre devenir)...

Ou encore pour prendre soin de l'autre (quand nous envisageons - ou imaginons - les conséquences que notre parole peut avoir sur l'autre).

La vérité, qu'est-ce que c'est, au juste ?

Il est difficile d'évoquer la question du mensonge sans parler également de la vérité. La vérité est – elle aussi – une étiquette morale que nous pouvons à l'occasion plaquer sur les paroles d'un autre. 

Attention à ne pas confondre vérité et réalité : La réalité est "ce qui est en ce moment". Contrairement à la vérité, la réalité est toujours mouvante.

"Ce qui est" correspond à la fois à ce qui est autour de nous et en nous.

Mensonge et vérité correspondent souvent à une paire d'étiquettes morales qui influent sur notre perception de ce qui est en train de se passer.

Comment réagir à ce que nous percevons comme un mensonge  (avec les outils de la Communication Non Violente) :

  1. L'observation : J'ai vu ceci... et tu dis cela...
  2. Nos sentiments, nos émotions : Quand je t'entends dire ça ; je me sens (...perplexe, agacé, révolté, furieux...)
  3. Nos besoins "non satisfaits" : J'ai besoin de (...clarté, compréhension, confiance...)
  4. Notre demande : Dans ce cas ce sera probablement une demande de connexion Exemple : L'autre serait-il d'accord de me dire ce qu'il a entendu, ou compris de ce que je viens de lui dire ? ou encore : Comment se sent-il avec ça ?...

Rappel : les 2 catégories courantes de demandes en CNV sont la demande de connexion et la demande d'action (du type "serais-tu d'accord pour faire ceci ou cela ?")

 

Objection courante : "Pffft.... La CNV ça ne marche pas !

"La CNV ça ne marche pas ...puisque lorsque je l'utilise, je ne réussis toujours pas à obtenir ce que je veux de l'autre" ( ici, comprendre : "...qu'il arrête de me mentir"). Air connu…

Attention : il faut bien comprendre que la CNV n'est pas faite pour cela! Elle vise plutôt à nous permettre de découvrir une plus grande paix intérieure, qui soit indépendante du fait que l'autre continue ou pas à faire quelque chose qui ne nous convient pas.

Il s'agit simplement de se sentir en lien avec l'autre. Mais cela ne signifie pas pour autant que les besoins de tout le monde sont écoutés et respectés tout le temps, ni que tout se passe toujours conformément à nos attentes.

La CNV n'est pas cela. Elle est plutôt un processus très pragmatique et très réaliste, contrairement a ce que certains croient parfois.

Ce à qui devrait (en principe) servir la CNV : Être dans une manière d'être en relation aux autres qui fasse que je sois en paix avec moi-même ! (…mais pas nécessairement avec l'autre, du moins pas à n'importe quel prix !). Et ceci quelles que soient les émotions qui me traversent, et quelles que soient les situations.

Soyons clairs, cela ne va pas changer tout ce qui m'entoure!

Ainsi, lorsque nous utilisons la CNV pour réagir à un mensonge, si nous avons l'impression que l'autre "s'enferre dans ses mensonges", ou "persiste dans sa mauvaise foi", il nous suffit de prendre conscience du fait qu'à ce moment-là nous avons nous-même besoin d'empathie, et peut-être aussi de faire le deuil d'un besoin de "lien d'authenticité" avec cette personne.

Si de son côté l'autre n'a pas les moyens (ou bien n'a pas l'élan) de ce lien d'authenticité avec nous, la conclusion que nous devons en tirer est juste que nous avons peut-être besoin de nous préserver de la personne en question. La seule question qui vaille en pareil cas est "Qu'est-ce qui est bon pour moi?". En laissant le cas de l'autre au deuxième plan (du moins provisoirement).

Le grand mérite de la CNV dans ce genre de situations

En pareil cas, la CNV va me permettre de me préserver sans fermer mon cœur ! En effet, la tristesse que nous pouvons ressentir lorsque nous faisons le deuil d'une relation à l'autre n'est rien en comparaison de la tristesse que nous ressentons lorsque nous refermons notre cœur, qui nous fait en général bien plus de mal. Ainsi, je peux très bien aller jusqu'à me retirer d'une relation pour me préserver, sans pour autant que cela s'accompagne forcément de jugements moraux sur l'autre.

Mais tout cela nécessite que j'arrête auparavant de croire que grâce à la CNV, toutes mes relations connaîtront une "happy end".

Qu'est-ce qu'être authentique ?

C'est la question que je l'on peut aborder pour clore (provisoirement) ce sujet.

Contrairement à ce qu'on peut croire, être authentique ne signifie pas forcément "dire ce que je crois, ce que je sais, où ce que je pense" de l'autre, et encore moins "lui dire ses quatre vérités" (en l'occurrence, les "vérités" en question risquent fort en définitive de n'être que des jugements, et souvenons-nous que la plupart du temps, "le juge... ment" 🙂

Non, être authentique, pour la CNV, c'est d'abord exécuter les quatre étapes du processus de CNV pour soi-même:

1) L'observation de ce qui est

2) L'identification de nos sentiments, de nos émotions provoqués par cette observation

3) L'identification de ceux de nos besoins qui, éventuellement, ne sont "pas nourris"

4) La demande concrète que nous pouvons nous faire nous-même.

...Ensuite, si on veut "être authentique jusqu'au bout", il nous reste maintenant à transformer tout cela en une demande concrète dirigée vers l'autre. Lui faire en quelque sorte le cadeau de lui exprimer ce qui est vivant en nous.

Être authentique, c'est avant tout un moyen pour nourrir la connexion à soi ou à l'autre, mais ce n'est pas une fin en soi. Le dicton populaire qui dit que "Toute vérité n'est pas bonne à dire" est ici parfaitement justifié.

Iĺ n'y a aucune obligation à être authentique à chaque instant et à tout prix.

En effet, dès que je pose une étiquette morale, sur quelque chose, que cette chose soit positive ou négative, je ne suis plus relié à "ce qui est". Cela me coupe de toute perception directe de ce qui est, au bénéfice d'une image duelle  (bien/mal, juste/injuste, vrai/faux) du monde.

Si, au lieu de cela, votre intention et de vivre pleinement la réalité de ce qui est, tâchez de ne pas nourrir ni entretenir de nouvelles étiquettes morales sur les choses, sous prétexte d'une certaine idée de l'authenticité.

En fait, vivre dans l'authenticité, cela consiste avant tout à conserver le choix des moyens que nous voulons utiliser. Ainsi, il m'arrive de mentir à quelqu'un par souci de la relation, ou encore par délicatesse. parce que j'ai l'impression que cette personne n'aura pas forcément les moyens de digérer ce que j'ai à lui dire à un instant T...

Mais en pareil cas, je tâche de faire cela en conscience, je ne me juge pas, je suis en paix.

Il est très important que nous gardions en toutes circonstances le choix des moyens que nous souhaitons utiliser pour nourrir notre besoin de connexion à l'autre.

…Y compris lorsque cet autre nous dit autre chose que "ce qui est".


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Josiane de Saint Paul

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